Questions de poids :
Ados belges francophones : de grands consommateurs de sodas.
D’après l’étude internationale HBSC
Les sodas sucrés et light en bref
Les sodas sont des boissons, souvent gazeuses, qui contiennent des sucres ajoutés (« sodas sucrés ») ou des édulcorants intenses, comme l’aspartame ou la stevia (« sodas light »). Les sodas sucrés font partie de la famille des boissons sucrées au même titre que les boissons à saveur de fruits (nectars), les boissons pour sportifs et énergisantes, les eaux aromatisées, les boissons sucrées à base de thé, café ou lait. A savoir que les jus de fruits 100% sont aussi considérés comme des boissons sucrées, même s’ils ne contiennent pas de sucres ajoutés.
Les adolescents et les jeunes adultes sont parmi les plus grands consommateurs de boissons sucrées dans le monde entier [1] [2]. Une consommation élevée de sucres, en particulier de boissons sucrées, augmente le risque de développer des caries dentaires [3] ainsi qu’une prise de poids excessive [4].
Pour cette raison, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) recommande un apport en sucres inférieur à 50g par jour pour un adolescent [5]. Soulignons qu’une bouteille de soda de 50cl apporte à elle seule environ 50g de sucres.
Quant aux sodas light, ils ne sont pas considérés comme des alternatives plus favorables à la santé [6] et le remplacement de boissons sucrées par des boissons édulcorées n’est pas conseillé chez les enfants en bonne santé [7]. L’eau reste la boisson à privilégier en toutes circonstances.
Sous l’égide de l’OMS, l’enquête HBSC est réalisée depuis 1986 en Europe et en Amérique du Nord. Tous les 4 ans, des adolescents âgés de 11, 13 et 15 ans sont interrogés sur leurs comportements et leur bien-être au moyen d’un questionnaire anonyme distribué en classe. Entre 2002 et 2018, la fréquence de consommation en « Coca® ou autres sodas sucrés » a été évaluée auprès d’environ 530.000 adolescents dans 21 pays européens. D’autre part, plus de 70.000 adolescents ont rapporté leur consommation de « Coca light/zero® ou autres sodas light » dans cinq pays ayant inclus cette question depuis 2006.
Pour chaque pays et chaque année d’enquête, les adolescents ont été classés en trois catégories selon le niveau d’aisance matérielle de leur foyer : bas, intermédiaire et élevé. Ce classement était basé sur un score composite évaluant la possession de biens familiaux, tels que voiture(s), chambre à soi, ordinateur(s) et tablette(s), salle(s) de bains, lave-vaisselle, et vacances.
Jeunes belges francophones : de grands consommateurs de sodas sucrés
L’étude internationale HBSC a permis de montrer que le nombre de consommateurs journaliers de sodas sucrés a progressivement diminué en Europe du Nord, de l’Ouest et du Sud entre 2002 et 2018, y compris en Belgique francophone. Mais, en comparaison avec les 20 autres pays étudiés, la Belgique francophone :
• est le pays qui compte, en 2018, la plus grande proportion de consommateurs quotidiens de sodas sucrés de toute l’Europe : 29%, contre 24% en Flandre, 23% en France et au Luxembourg, 17% aux Pays-Bas et 14% en Allemagne ;
• et est parmi les pays qui ont vu leur pourcentage de consommateurs quotidiens de sodas le moins diminuer entre 2002 et 2018 (Figure 1). En Belgique francophone, le pourcentage est passé de 38% de consommateurs journaliers en 2002 à 29% en 2018 (soit 23% de réduction). Les réductions étaient aussi relativement faibles en Flandre, en France et au Luxembourg, alors qu’elles étaient supérieures à −70% en Irlande, en Norvège et en Angleterre.
Figure 1. Carte de l’Europe montrant les baisses relatives de la proportion de consommateurs journaliers de sodas sucrés entre 2002* et 2018 (les fortes baisses sont en vert plus foncé)
Par ailleurs, la Belgique francophone fait partie des huit pays sur 21 dans lesquels un accroissement des inégalités sociales, relatif à la consommation de sodas sucrés, a été observé entre 2002 et 2018. En effet, la proportion d’adolescents consommant quotidiennement des sodas sucrés a diminué de façon plus importante chez ceux issus des familles les plus aisées matériellement, par rapport à ceux des familles les moins aisées (Figure 2). Une augmentation de l’influence du milieu social sur la consommation de sodas sucrés a aussi été observée en Flandre et aux Pays-Bas, mais pas au Luxembourg, ni en Allemagne. La France est le seul pays qui a vu ses inégalités sociales se réduire au cours du temps.
Figure 2. Proportions de consommateurs quotidiens de sodas sucrés en Belgique francophone au cours du temps et selon un score composite d’aisance matérielle familiale
Sodas light : des constats similaires
Chez les adolescents scolarisés en Belgique francophone, tout comme chez ceux de Flandre, la consommation quotidienne de sodas light a diminué au cours du temps. En 2006, 22% des adolescents belges francophones rapportaient consommer au moins un soda light chaque jour, alors qu’ils n’étaient plus que 17% en 2018. A noter qu’en tout temps, la Belgique francophone comprenait la proportion la plus élevée de consommateurs journaliers de sodas light parmi les cinq pays européens qui ont recueilli des informations à ce sujet (Flandre, Irlande, Islande et Pays de Galles). L’étude HBSC a aussi montré que la consommation de sodas light en Belgique francophone avait surtout diminué chez les adolescents les plus aisés matériellement, de sorte qu’en 2018, 12% des adolescents issus de familles les plus aisées consommaient des sodas light tous les jours tandis qu’ils étaient quasiment le double (21%) dans les familles les moins aisées.
Que faut-il retenir ?
Ces résultats mettent en exergue trois éléments notables pour la Belgique francophone :
1. La baisse de la consommation des sodas sucrés et light chez les jeunes. Toutefois, il reste possible que les sodas soient en partie remplacés par d’autres sortes de boissons sucrées comme les boissons énergisantes [8] ou les boissons à saveur de fruits.
2. Une consommation régulière de sodas sucrés et light chez les adolescents belges qui reste trop élevée compte tenu des risques sanitaires associés à de tels apports en sucres. Ce, alors que les exemples de pays anglo-saxons et nordiques montrent qu’il est possible de réduire fortement la consommation de sodas sucrés chez les adolescents.
3. Un accroissement des inégalités sociales au regard de ces consommations.
Ce constat souligne l’importance de développer ou renforcer des programmes et politiques de santé publique visant les jeunes et prenant en compte les facteurs socio-économiques. Soulignons que la combinaison de programmes d’éducation nutritionnelle avec des politiques alimentaires en milieu scolaire (p.ex. disponibilité réduite des boissons sucrées et accès facilité à l’eau) s’est avérée efficace à réduire la surconsommation de boissons sucrées [9] [10]
Ces résultats sont en cours de publication dans une revue à comité de lecture : Chatelan A, Lebacq T, Rouche M, Kelly C, Fismen AS, Kalman M, Dzielska A, Castetbon K. Time trends in the consumption of sugar- and artificially-sweetened beverages among adolescents across 21 European countries between 2002 and 2018. Vous trouverez divers résultats de l’étude internationale HBSC en suivant ce lien : http://www.hbsc.org/. Si vous souhaitez plus d’informations sur les résultats de l’étude HBSC en Belgique francophone, des brochures détaillées sont disponibles sur le site web du SIPES : http://sipes.ulb.ac.be/
Article rédigé par Angéline Chatelan, Post-doctorante à l’École de Santé Publique de l’ULB