Questions de poids :
Maigrir, c’est mathématique...
Face aux personnes obèses, les recommandations de santé sont claires : perdre du poids est bénéfique. Comment y arriver ? Pour Michel Lamotte, docteur en kinésithérapie et en science de la motricité, l’exercice physique adapté est un moyen sûr et incontournable afin d’y parvenir. Mais cette voie réclame des efforts...
Pour les personnes obèses, perdre du poids est un parcours semé d’obstacles. Pourtant, le principe est clair : face aux conséquences de l’obésité et à l’augmentation de son incidence dans notre société, la perte de poids est une nécessité de santé. "En Belgique, 1 personne sur 2 estime qu’il n’y a pas de lien entre le poids et la pratique d’exercice physique. Or contrairement à cette idée reçue, l’exercice physique est une stratégie majeure permettant de maigrir et de prendre en charge sa santé. De plus, l’activité procure aussi aux personnes obèses une amélioration de leurs capacités physiques", détaille Michel Lamotte, licencié en éducation physique, docteur en kinésithérapie et en science de la motricité au centre de réadaptation physique pluridisciplinaire de l’hôpital Erasme (ULB).
Des vérités, rien que des vérités...
"Dans une grande majorité des cas, l’alimentation et la sédentarité expliquent les situations d’obésité, rappelle Michel Lamotte. Certes, nous ne sommes pas tous égaux : avec 2400 calories par jour, certaines personnes grossissent, d’autres pas." Mais, pour toutes, c’est... mathématique : à alimentation égale, bouger davantage entraîne des dépenses supplémentaires. "Cela a donc un impact sur le poids, à condition que l’activité physique soit suffisante ", ajoute le kinésithérapeute.
En plus de "brûler des calories", l’objectif doit être d’augmenter la masse musculaire. En effet, une masse musculaire plus importante a pour effet d’avoir un métabolisme de base plus élevé : on consomme plus d’énergie pour vivre. A contrario, un régime sévère, avec par exemple 1000 ou 1500 calories par jour et peu ou pas d’exercice, entraine à la fois une perte des masses grasse et maigre : on maigrit de quelques kilos mais en perdant du muscle. Or plus on en perd, moins le métabolisme de base est élevé : nos apports alimentaires doivent alors être moins importants, afin de ne pas prendre de poids.
De la sueur et encore de la sueur
Pour augmenter sa capacité physique et renforcer la masse musculaire, il s’agit de pratiquer des exercices avec une intensité suffisante (la sensation d’essoufflement doit être présente) et en quantité suffisante (comptez au moins trente minutes par jour). Ils devront être adaptés et choisis en fonction des capacités de départ de chaque personne. Petit bonus : "De nombreuses études montrent que lorsque les efforts accomplis sont assez intensifs, l’organisme continue à dépenser de l’énergie dans les heures suivant l’arrêt de l’activité. C’est ce que l’on nomme la dépense énergétique post-effort", précise Michel Lamotte. Bref, bouger suffisamment et de manière adaptée fait perdre du poids... pour autant qu’on y consacre des efforts. Et sinon ? "Eh bien, sinon, cela ne marche pas", confirme-t-il.
"Se débarrasser d’un kilo de graisse représente une perte de 7 000 calories, ce qui n’est pas rien", souligne-t-il. Mais l’effet de l’activité physique est indéniable sur les systèmes cardio-vasculaire et métabolique, sans parler de la mortalité : un BMI (body mass index) supérieur à 35 peut signifier 7,2 années de vie en moins et avoir un réel impact sur la qualité de la vie. De quoi se dire que cela vaut la peine de "mouiller son maillot" ?
Des petits pas qui comptent
En termes de santé, chaque kilo perdu est bénéfique.
En pratique, quand on marche, on estime parvenir à une dépense d’environ 1 Kcal par kilo et par kilomètre. "Une personne de 75 kilos qui marche 1 kilomètre perd donc 75 Kcal (l’équivalent de 3 morceaux de sucres) et 5 kilomètres représentent environ un petit bâton de chocolat, précise Michel Lamotte, docteur en kinésithérapie et en science de la motricité. Bien évidemment, si on décide de marcher tous les jours 2 kilomètres et qu’on ne le faisait pas avant, à alimentation égale, en un mois, il y aura bel et bien une perte de poids." Sur une telle période, elle peut sembler mineure. Mais après un an d’efforts ?)]
Une question d’adaptation
Pour une personne obèse, le choix d’une activité physique dépend, comme pour tout le monde, de ses goûts mais, aussi, de sa capacité physique de départ.
"En général, et pour autant que d’éventuels problèmes ostéo-articulaires ne soient pas trop importants, on propose aux personnes obèses de commencer par de la marche ou par du vélo, détaille Michel Lamotte. La salle de fitness - pour autant qu’elle soit dotée de bons moniteurs sportifs, ce qui n’est pas si simple à trouver - est une autre possibilité. Qu’elle que soit la météo, la salle permet de varier les exercices, de doser l’intensité et de travailler la musculation. Il faut cependant des programmes d’activités soutenues pour obtenir un effet... et ne pas s’inquiéter de voir parfois son poids augmenter légèrement puisque les muscles sont plus lourds que la graisse." A défaut, la natation peut être une option éventuelle, mais à condition de nager avec énergie et longtemps (ce qui risque de développer l’appétit !).
Bien sûr, si cela convient à la personne, rien n’exclut le ski de fond, la zumba ou toute autre activité qui augmente le rythme cardiaque...)]
Des bons plans. Et d’autres, moins sympas...
Voici quelques pistes très "pratiques" suggérées par Michel Lamotte.
Feu vert : Prenez les escaliers ! Un étage au début. Puis deux, puis trois. Au boulot, dans le métro, les grands magasins, pour rejoindre son appartement (et pour en descendre).
Feu rouge : Moins elles bougent, plus le poids des personnes obèses risque de s’aggraver. Et quand il faut s’activer avec 10 kilos de plus, c’est encore plus compliqué : tous les éléments d’un cercle vicieux sont alors en place...
Feu vert : Bougez progressivement. Le premier jour, marchez dix minutes. Même si tout s’est bien passé, cela ne signifie pas forcément qu’il faut passer à 20 minutes dès le deuxième jour et à trente le suivant. En effet, vous risquez alors de développer des douleurs musculo-squelettiques... et de vous décourager, avec un retour à la case sédentarité.
Feu rouge : Regardez passer les trottinettes électriques. Et contentez vous de cela, pendant que vous marchez d’un bon pas : vous bougez nettement plus que ceux qui les manient...
Feu vert : Oubliez les régimes draconiens, à 1 000 ou 1 500 calories au quotidien. Optez plutôt pour un plan comprenant 100 calories de moins par jour, ce qui est peu. Mais ajoutez-y également de l’exercice afin de perdre 100 kcal supplémentaires par jour. Dès la fin du premier mois, vous aurez environ un kilo de graisse en moins. Il suffit de continuer...
Feu vert : De nombreux hôpitaux proposent aux personnes obèses d’intégrer un centre ou une plate-forme pluridisciplinaire du surpoids ou de l’obésité. Ces prises en charge pluridisciplinaires, qui allient psychologues, diététiciens et spécialistes en exercice physique, représentent un tout indissociable.
On vous a compris...
Pour une personne obèse, décider d’augmenter ses dépenses énergétiques en pratiquant une activité physique demande souvent de dépasser une série d’obstacles, qui freinent sa motivation. En voici un certain nombre :
trouver le temps nécessaire (un argument qui la met à égalité avec tout le reste de la population).
croire que l’on est trop "vieux" pour s’y mettre.
dépasser ses complexes par rapport à son apparence. Redouter de se montrer en maillot ou en collant.
craindre de transpirer.
avoir peur de se blesser ou d’avoir mal.
dépasser la difficulté de (parfois) s’y mettre seul.
trouver une activité physique adaptée à son profil et à sa situation physique de départ.
faire des efforts pour un résultat qui paraît mineur ou insignifiant à ses yeux (en termes de perte de poids).
manquer de repères pour parvenir à gérer son activité physique, ne pas se fixer d’objectifs réalistes et progressifs, échouer à obtenir des résultats correspondant à ses attentes et... se décourager. )]
Article rédigé par notre journaliste santé Pascale Gruber