Ces femmes ambassadrices d’une alimentation durable

Invitation à découvrir les tables d’hôtes du GAFFI

Dans le cadre des actions d’alphabétisation et d’éducation permanente, le GAFFI (Groupe d’Animation et de Formation pour Femmes Immigrées) aborde, depuis plusieurs années, des thématiques liées au développement durable.

Des visites, des animations spécifiques, en collaboration notamment avec le réseau Culture et Développement, sont organisées.


Des projets d’alternatives à la consommation voient le jour (jardin collectif, transformation de vêtements). En 2013, un groupe d’alphabétisation participe à des animations proposées par l’asbl Rencontre des continents visant la sensibilisation à l’alimentation durable. Ces animations suscitent un réel intérêt, l’alimentation étant une problématique au centre des préoccupations. Douze participantes poursuivent la démarche en suivant une formation de neuf jours de "Maître cuisinier en cuisine écologique et politique" organisée par la même asbl.

De cette formation naît chez les participantes :

  • une prise de conscience et une compréhension des enjeux globaux du développement durable
  • la volonté de mettre en place un projet collectif autour de l’alimentation.

Elles sont animées par une dynamique et une confiance en la capacité de pouvoir agir pour améliorer leurs conditions de vie et amorcer des changements au niveau personnel et collectif. Conscientes des impasses de notre modèle de développement, elles élaborent une alternative dans une visée de résistance, de changement et de réappropriation. Dans une démarche d’éducation populaire, se construit avec le groupe porteur un projet axé sur l’organisation de tables d’hôtes en alimentation durable.

Une action pilote : un projet collectif proposant des assiettes écologiques, locales et de saison

Concrètement, tous les quinze jours, les participantes proposent au Gaffi un repas basé sur les principes de l’assiette écologique, locale et de saison.
L’action pilote qui fut menée de septembre 2013 à juin 2014 fut une expérience très valorisante pour le groupe porteur qui en a tiré de nombreux apprentissage dans la construction et l’organisation d’un projet réellement collectif.
Les difficultés rencontrées ont été nombreuses, mais propices à un travail de réflexion, de concertation, de recherche de solutions, afin de les dépasser et d’améliorer au fur et à mesure le projet en construction.

Elles ont été bénéfiques pour la :

  • cohésion du groupe,
  • construction collective du projet,
  • mutualisation des compétences et des idées créatrices,
  • transformation des points de vue.

Elles sont devenues de véritables relais pour sensibiliser aux problématiques de l’alimentation.

Les défis du projet

Voici quelques défis auxquels ce projet à dû faire face :

  1. la gestion du temps : un tel projet a requis un engagement important des participantes. L’organisation d’une table d’hôtes demande deux jours de travail (réunion, courses, préparation, service, rangement, évaluation) ;
  2. l’infrastructure de la cuisine peu adaptée : nous avons équipé progressivement la cuisine en matériel pour la cuisson et le service ;
  3. la relation avec les hôtes : il a fallu faire face à des réticences (méfiance vis-à-vis de certaines recettes, critiques sur le service, les quantités, l’absence de viande dans les menus...) et faire comprendre petit à petit les objectifs du projet qui in fine a déclenché une réflexion sur l’alimentation ;
  4. la construction collective d’un projet  : la mise à plat de petits conflits vécus dans le groupe a renforcé la cohésion du groupe

Les participantes d’origines, de milieux, d’âges divers ont appris à se connaître, à s’entendre, à se faire confiance et à porter ensemble un projet commun. Elles ont osé faire des choses dont elles ne se sentaient pas capables.
L’expérience vécue a aidé à retrouver confiance et estime de soi, à se projeter dans les projets personnels et professionnels. Oser, imaginer, essayer, vivre un projet collectif ont suscité une rencontre extraordinaire qui a rapproché des femmes d’origines diverses et balayé de nombreux préjugés. Elles ont retrouvé du pouvoir d’agir et convaincues de l’importance de changer leurs habitudes de consommation alimentaire et d’améliorer leurs conditions de vie, elles ont la volonté de transmettre leurs savoirs : auprès des hôtes, de leur famille, de leur entourage, de leur communauté, de leur quartier.

Une animation fédératrice

A travers l’animation de tables d’hôtes fédératrices, elles jouent un rôle central dans la sensibilisation en devenant relais auprès du public du Gaffi présent au moment des tables d’hôtes (stagiaires en Insertion Socio-Professionnelle, apprenantes en alphabétisation, travailleurs de l’asbl et d’autres associations partenaires).
Issues d’origines culturelles différentes (Maroc, Guinée, Afghanistan, Somalie) mais vivant des situations socio-économique précaires (au chômage, CPAS ou sans revenus et qualification), elles sont devenues les meilleures porte-parole pour transmettre les connaissances acquises et sensibiliser aux enjeux de l’alimentation ainsi qu’aux possibilités d’actions au quotidien.

Les changements qu’elles-mêmes ont vécus, il leur tient à coeur de les partager et d’amener d’autres aux mêmes questionnements, à une meilleure compréhension des défis alimentaires et à un changement des habitudes en matière d’alimentation et de santé.

Les évaluations recueillies auprès du public participant au projet ont été très positives et nous incitent à poursuivre les actions mises en place au vu aussi des changements qu’il a engendrés à différents niveaux : image et estime de soi, confiance en ses capacités d’agir, changements dans ses habitudes alimentaires et répercutions sur la santé, impacts positifs sur la famille et l’entourage, volonté de transmettre ses nouvelles connaissances et de susciter réflexions et changements en matière d’alimentation...

Les tables d’hôtes se révèlent bien être un lieu où le groupe porteur peut transmettre tout ce qu’il a appris et sensibiliser aux problématiques de l’alimentation.
Ce projet permet aussi d’amorcer des changements sur plusieurs plans

  • nutritionnel (mieux se nourrir),
  • socio-économique (développer des compétences qui ouvrent de nouvelles pistes vers la formation et l’emploi),
  • politique (développer des alternatives collectives en faveur de la souveraineté alimentaire)
  • interculturel (partager, mutualiser ses savoirs, pratiques, richesses culturelles).

Valérie Legrand, article paru dans Réseau-nanceS, la revue périodique de Culture & Développement asbl. Crédit photos@Gaffi

Plus d’informations : www.gaffi.be et www.cultureetdeveloppement.be

Mis à jour le 28/12/2015